you're the only type of dynamite that's never going to bang

On ne peut pas vraiment dire que Lara qualifierait la Gare Centrale d’endroit divertissant. Certes, elle était très vaste et il y avait beaucoup d’endroits à visiter, mais la demoiselle, qui était une exploratrice avide, en avait rapidement fait le tour et se retrouvait donc sans distraction. L’endroit  ne lui rappelait que trop son propre manoir, où elle ne passait pas beaucoup de temps car elle s’y ennuyait vite. Il faut dire qu’elle n’était pas accoutumée à la vie domestique, elle ne pouvait tout simplement pas supporter de se poser trop longtemps –Lara se lassait vite et ressentait le besoin d’être en constant mouvement, ainsi lorsqu’elle se forçait à quitter son jeu et découvrir le monde extérieur elle s’y ennuyait rapidement.  Non, décidément, vivre la vie du citoyen lambda n’était pas son truc.

Son lieu préféré à la Gare était définitivement la salle de sport. Maintenir une activité physique régulière lui permettait non seulement de rester en forme mais surtout de se défouler tout en s’amusant. Ca l’occupait pas mal, on pourrait même dire qu’en dehors des moments où elle se poussait à socialiser, c’était sa seule activité.
Ce jour-là n’échappait pas à la règle ; après avoir quitté son jeu elle s’était confinée dans la salle de sport de façon presque rituelle afin de s’adonner avec joie à divers exercices.  Ce n’est que plusieurs heures plus tard qu’elle se dit qu’il était peut-être temps de s’autoriser une pause, comme toute personne normale le ferait –même si on ne peut pas vraiment dire que Lara soit normale. Elle avait donc quitté la salle de sport dans l’espoir d’aller prendre un verre –c’est vrai que boire tout seul c’était un peu la lose, mais même si elle ne connaissait pas grand monde elle pourrait peut-être croiser quelqu’un qu’elle connaissait ou même sympathiser avec n’importe qui. Lara était donc en route vers le bar lorsqu’elle le vit de loin. Inconsciemment, elle sourit. Cesare Borgia était lui aussi une excellente source de divertissement pour la demoiselle ; elle n’arrivait vraiment pas à le prendre au sérieux, ainsi cela lui avait conféré le don d’illuminer ses journées sans même faire exprès.  


Elle l’avait laissé lui prendre la main et l’embrasser avec réticence tout en réprimant un petit rire. Venait-il sérieusement de l’appeler "mon enfant" ? Elle aurait carrément préféré un truc du genre « wesh ton père travaille dans une usine de biscottes ? parce que t’es craquante » –bon d’accord, peut-être pas, mais "mon enfant" n’était sans doute pas la meilleure façon d’accoster une demoiselle (parce que ça faisait légèrement pédophile sur les bords). Lara lui décrocha un sourire peu convaincu en se retenant toujours d’éclater de rire. « Et vous, votre splendide chevelure n’a d’égale que votre maladresse. » Elle lui avait quand même fait un petit compliment pour flatter son égo –et atténuer la triste vérité qu’était son échec total en matière de drague. Et oui, elle s’était sentie obligée de le lui faire remarquer –difficile d’échapper à la franchise de la demoiselle, d’autant qu’elle adorer taquiner Cesare dès qu’elle en avait l’occasion.


Il ne faut dire qu’elle ne s’attendait pas vraiment à autant de galanterie (enfin… il a essayé quoi !) de la part de Cesare, après tout il était plutôt du genre à sous-estimer les femmes, voire les mépriser.

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Elle n’avait vraiment pas pu s’empêcher de lui décocher une reproche –elle n’arrivait que trop mal à retenir sa répartie, d’autant que s’il voulait la flatter, il y avait de meilleurs moyens de s’y prendre. Il faut tout de même avouer que la demoiselle trouvait en sa maladresse un véritable divertissement ; c’était d’autant plus drôle car il ne s’en rendait même pas compte, sans doute aveuglé par son égo surdimensionné qui lui cachait la gaucherie de ses mots et gestes. Heureusement que Lara était là pour le lui faire remarquer –même s’il feignit l’indifférence, ce qui renforçait le côté comique de la chose. Il n’empêche que l’aventurière était sincèrement intriguée par cette approche différente, aujourd’hui. Elle lui demanda donc curieusement quelle en était la raison.

Alors que Cesare ouvrait et fermait sa bouche comme un poisson rouge en tentative de communication, elle attendait une réponse les bras croisés sur sa poitrine, un sourire légèrement narquois toujours accroché à ses lèvres comme pour opposer l’expression acariâtre du jeune homme. Refusait-il d’avouer les véritables intentions par lesquelles il abordait la demoiselle aujourd’hui ?  Elle ne doutait pas que sa fierté l’empêcherait d’admettre même les choses les plus futiles, toujours est-il que ce silence alimentait sa soif de savoir. La curiosité s’emparait donc d’elle de plus en plus et c’était avec hâte qu’elle espérait une réponse, s’accrochant à ses lèvres en attendant que des mots s’en déversent. Autant dire tout de suite qu’elle ne s’attendait pas vraiment à entendre ce qui suivit.


Si la mâchoire de Lara était détachable elle l’aurait elle-même arrachée avant de la jeter au sol. Elle avait évidemment été surprise par cette réponse qui la laissait bouche-bée ; elle, une courtisane ! Elle n’était vraiment pas du genre narcissique ou arrogant, mais sa fierté en prenait tout de même un sacré coup ! Elle connaissait bien l’extravagance et le culot légendaires des Borgia, mais en faire personnellement les frais était autre chose. Cesare avait de la chance de ne pas être tombé sur elle pendant une mauvaise journée car elle n’aurait probablement pas hésité à lui coller un poing au milieu du visage –elle n’était pas aussi délicate qu’elle en avait l’air et il aurait sans doute été très surpris de le découvrir.


C’était tout sourire, l'air décontracté et avec une sérénité à vous glacer le sang qu’elle avait prononcé ces mots, ne cherchant évidemment pas à se quereller mais plutôt à provoquer avec taquinerie, histoire de le pousser à bout. Après tout c’était lui qui était venu vers elle, et s’il abandonnait vite elle en rirait encore plus.